Selon une étude du MIT de juin 2025, ChatGPT et consorts rendraient notre cerveau fainéant. Que l’étude ne soit pas vraiment représentative ou que les résultats ne soient pas significatifs m’importe peu en fin de compte. Je pense être aligné, en partie, avec la conclusion.
Écrire et traduire, c’est comme la course à pied : si on s’arrête de pratiquer pendant deux mois, c’est très compliqué de s’y remettre. Mieux vaut maintenir un certain entraînement, même léger.
En plus, en dehors du bénéfice supposé pour la santé de tes neurones, je trouve qu’avoir systématiquement recours aux IA génératives pose un problème sur la satisfaction intellectuelle. Quand on veut produire un texte sur un sujet que l’on maîtrise, et si l’écriture n’est pas un obstacle majeur, il est regrettable de laisser l’IA effectuer tout le travail. Personnellement, je reconnais ma prose en un clin d’œil. En conséquence, j’ai du mal à m’approprier un texte, fût-il bien rédigé, écrit en mon nom par un robot. Je ne peux me résoudre à y apposer mon nom, surtout lorsque j’ai le sentiment de retrouver les stéréotypes syntaxiques et stylistiques des IA.
Un internaute m’a interpellé (avec une pointe de cynisme !) à ce sujet :
Oui aussi, c’est pareil, j’ai gardé ma calèche parce que je trouve ça trop facile la voiture.
Je comprends tout à fait ce qu’il sous-entend. Et il a raison de promouvoir l’usage des technologies pour améliorer notre confort et notre productivité. Mais ma mise en garde est différente. En substance, ce que j’ai dit à l’internaute, c’est que sortir la calèche (ou la voiture) pour aller au bout de la rue finit par ramollir nos jambes… et nous fait oublier le plaisir de marcher.
Du coup, que l’on ne s’y méprenne pas, je ne suis pas en train d’affirmer que l’on devrait s’affranchir des IA (je travaille moi-même dans le secteur de l’IA). Je les utilise souvent. Mais ça dépend pour quoi. Dans le milieu professionnel, je les trouve vraiment pertinentes pour résumer des textes et traduire des pages dans d’autres langues, entre autres. Elles sont fiables et permettent de dégager un temps plus que précieux.
Mais il faut aussi garder l’énergie et l’envie de produire soi-même… et se faire confiance !
Du coup, pour une rédaction plus personnelle (sur un sujet que je maîtrise), ce que je préfère faire, c’est de fournir un premier jet (quand même assez détaillé) aux IA et de leur demander de repérer les fautes, de vérifier la pertinence des transitions et éventuellement de valider ou d’infirmer mes positions par des sources. Parfois, je lui demande d’enrichir le fond en préservant autant que possible mon style d’écriture. Mais je sais de toute façon que je repasserai derrière pour être certain que mon empreinte demeure. Dans tous les cas, je préfère qu’elle cite certains de mes extraits de mon texte en argumentant ses choix plutôt que de tout réécrire. Un conseiller plutôt qu’un scribe.
Idem pour de courtes traductions en anglais sur des sujets créatifs (titres, slogans, noms fictifs, concepts) : je donne ma version et je le laisse commenter ; il diagnostique mon texte, me dit ce qui est réussi et suggère des alternatives pour certains mots ou certaines tournures. Là, j’apprends des choses. Il m’aide à m’élever.
Dans tous les cas, je prends du recul sur ce qu’il me propose et me répète sans cesse : si tu préfères ta version, ne cède pas, garde-la.
J’ai la chance d’avoir terminé la rédaction de Malgovert avant l’émergence des IAG (génératives). Ainsi, je n’ai pas été confronté au terrible dilemme : écrire seul ou avec un assistant… Parfois, je me dis que je devrais retravailler le manuscrit avec les IAG. Mais pour des raisons de confidentialité, je ne veux pas le leur livrer. Je ne veux pas que mon sang s’écoule dans leurs circuits d’apprentissage. L’autre avantage, c’est que si, un jour, ces technologies s’effondrent ou deviennent excessivement onéreuses, je continuerai à faire ce que j’aime, écrire, sans IA et sans souffrance.
La machine nous augmente autant qu’elle nous asservit.
Aujourd’hui, nous sommes libres ; tâchons de le rester.



